Le lendemain matin, Viviane se réveilla fraîche comme une fleur. Les vêtements n'avaient pas bougé du lit. Avait-elle simplement rêvé ? Mais elle sentait la piqûre de l'insecte entre ses cuisses.
Elle allait se rendre en courses lorsque lorsqu'elle remarqua un panier sur le pas de sa porte. Ce dernier contenait quelques bouquets de fleur et un petit mot rédigé avec une écriture raffinée mais stricte.
"Mlle Viviane, Merci de porter ces quelques bouquets à l'adresse suivante : "Couvent des sœurs pandorines, Rue de la Pénitence"
Un peu en colère de se faire prendre pour un vulgaire commis, Viviane se rappela le prix auquel elle louait son appartement et le contrat qu'elle avait signé. De plus les fleurs étaient si belles et leur parfum si agréable. Finalement cette dernière journée de vacances commençait bien. Elle n'allait pas la gâcher par un mouvement d'humeur idiot qu'elle pourrait regretter si le Professeur la mettait dehors.
Elle déambula dans la ville pour trouver l'adresse de ce couvent dont personne ne semblait connaître l'existence. Elle n'avait jamais entendu parler de cette congrégation de moniales mais elle trouvait gentil de la part du comte de leur offrir de si jolie fleurs. Ce bleu semblait presque magique et leur parfum très enivrant. Elle finit par trouver la ruelle dans la vieille ville, le couvent était adossé aux remparts de la citadelle. Arrivée devant la porte de bois massif, elle toqua et un petit guichet grillagé s'ouvrit puis un regard sévère la dévisagea.
— On ne reçoit personne ! lui lança une voix éraillée
Surprise et vexée, Viviane allait repartir lorsque la voix reprit chevrotante.
— C'est Monsieur le Comte qui vous envoie ?
Viviane se retourna et vit une femme sous un humble habit de moniale dont la beauté du visage contrastait avec la voix. Cette dernière venait au-devant de Viviane, contrite comme si elle avait commis une grosse faute.
— Monsieur le Comte est si bon avec nous, je n'ai pas reconnu la personne qu'il envoyait. Je suppose que le panier est pour nous ?
— Oui ma sœur ! C'est bien pour vous, de la part de Monsieur le Comte Van Dyck.
— Vous le remercierez du fond du cœur mademoiselle
— Je n'y manquerais pas. Répondit-elle en songeant qu'elle n'avait encore jamais vu son hôte.
Elle tendit le panier à la femme qui s'en saisit comme si sa vie en dépendait, presque comme un morphinomane s'accrochant à sa dose. Encore un contraste qui surprenait la jeune femme.
Involontairement, la sœur toucha une des fleurs qui se mit à émettre une odeur encore plus suave. Mais aussi vite qu'elle avait surgi de la porte, la sœur disparut derrière cette dernière. Une petite cloche sonna bientôt dans le clocher d'une chapelle cachée dans l'enceinte du monastère. Viviane regarda sa montre et trouva l'heure bizarre pour une célébration quelconque. L’heure des laudes était passé depuis longtemps à moins que ces religieuses ne célébrassent l'office de tierce.
Elle repartit sans se soucier plus que cela de cette bizarrerie. Une sensation bizarre et surtout une pointe de désir au fond de sa culotte commençait à monter en elle. Le bonheur de cette sœur avait été communicatif. Viviane sentit aussi une envie lui appuyer sur sa vessie. C'était de plus en plus étrange car elle avait pris ses précautions avant de sortir. Elle découvrit un passage dans la muraille qui donnait sur un petit espace de verdure sauvage et trouva un fourré pour pouvoir se soulager.
A quelques pas de là, masqué par les fourrés, un inconnu sourire aux lèvres tenait encore dans sa main le paquet de kleenex disparu. Heureux de ce qu'il avait pu observer discrètement, il s’évapora comme s'il n'avait jamais été là, laissant derrière lui un fugace nuage bleu.
Viviane repartit toute guillerette alors qu'à quelques encablures, dans la chapelle des pandorines, une cérémonie peu orthodoxe avait commencé, avec des chants et des montées dans les aigus peu liturgiques.
Au même instant, à l'autre bout de la ville, dans la petite maison de Marie, une joute amoureuse qui ne semblait pas sur le point de finir se déroulait entre la petite rousse et le satyre.
Quelques heures plus tôt, Satiricon avait quitté le manoir et glissait furtivement dans les rues de la ville. Il utilisait sa capacité de métamorphe pour se déplacer, ainsi de nuit il passait inaperçu, les gens ne voyaient que l'ombre d'un grand félin au pelage bleuté. Il n'aimait pas trop prendre la forme d'un insecte qui, même si elle était plus discrète, lui demandait beaucoup plus d'énergie pour reprendre son aspect normal, et elle était dangereuse, à la merci d'un animal plus gros que lui ou du geste rageur d'un humain.
En silence, il passait de jardins en jardins, franchissait les clôtures, parfois avançait prudemment sur les corniches le long des murs. Depuis le temps qu'il faisait ce parcours, il aurait pu le faire les yeux fermés. Malgré sa hâte de rejoindre la jeune femme, il prenait aussi le temps d'épier ce qui se passait dans les maisons qu'il longeait. En passant silencieusement devant la fenêtre d'une chambre ouverte où dormait un couple, il s'arrêta et s'ébroua pour remplir l'air de la pièce de cette poussière bleue qui lui recouvrait les poils. Caché derrière la tenture, il put voir l'homme se pencher sur son épouse et la couvrir de baisers en soulevant la légère nuisette qui lui couvrait le ventre. Peu de temps après, les gémissements se transformèrent en cris de plaisirs. Mais il avait déjà repris son chemin.
Parfois, il s'amusait juste à libérer un peu de poussière devant une fenêtre sans s'arrêter, il imaginait la situation qui s'en suivrait et cela dopait son excitation. Devant la maison de Marie, il hésita un instant. Dans la demeure voisine, il y avait une jeune fille qui lorsqu'elle le voyait apparaître dans le jardin sous sa forme féline, se précipitait vers lui pour le caresser. Elle devait avoir grandi depuis sa dernière visite. Mû par la curiosité, il sauta sur le petit appentis qui lui permettrait d'atteindre le rebord du chien-assis et de là se glissa dans la chambre.
La petite fille s'était transformée en une jolie adolescente à la longue chevelure blonde. Satiricon, se fit tout petit pour passer dans l'embrasure de la fenêtre entre-ouverte et bondit sur le lit comme il le faisait autrefois pour jouer avec Samantha. Il n'oubliait jamais les prénoms de ses "victimes". Elle sursauta et poussa un cri de terreur en se relevant brutalement. Il eut peur que ses parents ne se réveillent et se recula en se blottissant dans un coin de la chambre. Il savait qu'en faisant cela, si elle n'avait pas changé, elle viendrait le prendre dans ses bras.
— Oh ! C'est toi mon minou ! dit-elle remise de sa frayeur. Tu m'as fait peur, je pensais ne jamais te revoir.
Elle se leva en tendant les bras vers Satiricon immobile. Il voyait l'adolescente s'accroupir devant lui. Il se mit doucement sur ses pattes et imita le ronronnement des chats et se frotta contre les chevilles. Elle le laissait faire. Samantha, ravie de le retrouver, le caressait doucement. Elle ignorait qu'en faisant cela, ses mains recueillaient la poussière maudite. Elle le laissait se frotter sur ses cuisses, et même pousser sa tête contre son entrecuisse.
— Petit coquin ! lui dit-elle en riant.
Elle le prit alors dans les bras et s'allongea avec lui sur le lit. Sur le dos, elle le posa sur son ventre, la tête de Satiricon entre ses petits seins en forme de mandarines. Elle le caressait de plus belle. Elle se sentait de plus en plus lascive comme cela lui arrivait de temps à autre depuis qu'elle avait eu ses premières règles. Elle ferma les yeux et tandis que d'une main, elle câlinait la fourrure de son petit compagnon, de l'autre elle jouait avec ses tétons qui commençaient à durcir. Satiricon ne voulait pas effrayer la jeune fille et s'écarta doucement. Il s'éclipsa alors, aussi rapidement qu'il était entré en se promettant de revenir.
Il espérait que Monsieur le Comte serait satisfait de cette potentielle nouvelle recrue et arriva enfin devant la porte de sa récompense. Comme à son habitude, il entra par la chatière que Marie avait spécialement installée pour lui et reprit sa forme originale dans le salon. Le trajet et les multiples changements de forme lui avaient donné faim et il savait qu'il ne pourrait pas être rassasié juste avec l'énergie psychique qu'il pomperait à son amante.
Marie ne dormait pas encore, elle était toujours devant son ordinateur pour finaliser ses cours avant la rentrée. Elle le vit entrer et sourit en le voyant reprendre sa forme. Elle eut envie de l'invectiver pour ne pas lui avoir donné de nouvelles depuis toutes ces années, mais elle était si contente de le revoir qu'elle lui ouvrit les bras.
Elle savait qu'elle allait passer une nuit de rêve et qu'à la différence de ses amants humains, lui ne connaitraît pas de défaillance et il avait ce petit plus qu'aucun homme n'avait et la rendait folle à chaque fois qu'il le lui faisait.
Il s'avança vers cette jeune femme qui lui tendait les bras et tandis qu'elle levait le visage vers lui pour l'embrasser goulûment, ses mains soulevaient le tee-shirt qui recouvrait sa nudité. Il le savait, lorsque Marie était seule, elle ne portait pas de sous-vêtement et il pouvait ainsi caresser sans obstacle sa peau douce. Il ne comprenait pas comment les humains s'extasiaient devant des femmes qui n'avaient que la peau sur les os. Il allait pleinement profiter des rondeurs de cette humaine pour laquelle il s'était pris d'affection. Ses obligations auprès du Professeur l'avaient empêché de la retrouver depuis des années, il comptait bien rattraper le temps perdu.
Toujours enlacés, les deux amants se dirigèrent vers la chambre et Marie s'écarta à contre cœur pour retirer le seul vêtement qui lui restait et s'allonger sur le lit. D'un sourire radieux, elle l'invita à venir la rejoindre. Marie le guidait, elle adorait caresser le soyeux duvet qui recouvrait son corps, son aspect félin n'en ressortait que davantage. Elle s'abandonnait sans réserve à la langue démoniaque qui la caressait et lui promettait des plaisirs quasi ininterrompus.
Après une longue nuit et une matinée toute aussi longue à décliner toutes les positions possibles et imaginables avec un tel amant, Marie était épuisée. Elle dormait nue sur le lit, le corps caressé par les rayons du soleil. Satiricon la regardait, repu, et pendant que la jeune femme récupérait, il avait été se servir dans le réfrigérateur et avait constaté qu'elle avait toujours conservé cette habitude d'avoir une grande variété de fruit et légumes, "Oui c'est une créature de l'enfer végétarienne !" Il souriait en pensant à cela car de nombreuses fois, des femmes affolées le suppliaient de ne pas les dévorer. Il les dévorait bien mais pas de cette manière-là.
Il allait devoir rentrer. Il venait de ressentir un appel du Comte qui lui demandait ce qu'il faisait. Ses retrouvailles avec Marie avaient duré bien plus de temps qu'il ne le pensait et il n'aurait pas le temps de faire un détour par la maison voisine. Il lança un baiser dans l'air en direction de son amante et repris sa forme féline pour rentrer.