mardi 20 avril 2021

Eruption -06- Révélations

 

Luc et Jane avançaient lentement dans les cavernes, ignorant qu'ils avaient été suivis. Il les guidait lentement en se remémorant ses explorations épiques avec ses cousins et cousines et les colères de leur tante qui leur interdisaient d'y retourner. Mais cette fois-ci, ils avançaient dans des galeries qu'il n'avait encore jamais foulées. Plus ils avançaient et plus l'atmosphère leur semblait lourde, mais ils se sentaient aussi entourés par quelque chose de bienveillant qui les rassurait et leur donnait envie de progresser. Dans le faisceau de leur torche, ils commencèrent à découvrir des marques sur les parois.

Ils décidèrent de faire une pause et Jane ouvrit son sac pour prendre quelques barres de céréales. Elle sursauta en voyant la pierre briller.

– Que se passe-t-il ?

– Regarde la pierre, elle brille !

Luc prit alors la pierre. Lorsqu'elle fut complètement sortie du sac, elle brilla encore plus fort et soudain des symboles apparurent sur le plafond.

– Lorsque Luc déplaçait la pierre, les symboles se déplaçaient aussi.

Cette pierre semble être le moyen de nous guider dans ces galeries. Prends la torche pour nous éclairer et je vais tenir la pierre au-dessus de nos têtes.

Avec Jane qui dirigeait la lumière de la torche vers le sol et Luc qui tenait la pierre qui illuminait le plafond, ils avancèrent plus rapidement sans se poser de questions sur le chemin à prendre à chaque bifurcation.

 

Au même instant, en prenant une grande inspiration, Keireen franchit le seuil de la caverne. Elle ressentait la présence des sorts de protection qui protégeaient les couloirs. Elle savait que plus elle avancerait et plus elle devrait lutter contre les sortilèges tant qu'elle ne serait pas en possession de la pierre. Heureusement pour elle, ces sorts s'étaient affaiblis au cours des millénaires sinon elle n'aurait même pas pu entrer. Grâce à ses talents de chasseresse, elle avait repéré le chemin parcouru par ses proies. Elle savait qu'elle les rattrapait. Elle serait bientôt à leur contact. Elle avançait sans bruit, ils ne l'entendraient que lorsqu'elle leur sauterait dessus pour prendre possession de la pierre philosophale. Elle apercevait parfois au détour d'un corridor la lueur de la torche.

Soudain elle entendit un cri de surprise et de joie. Ils étaient là, devant elle, à quelques mètres. Elles les entendaient parler.

— Nous sommes dans un cul-de-sac ! Dit une voix masculine.

— Regarde sur le mur, on dirait une chouette ! Approche la pierre, elle me semble commencer à luire.

Elle s'approcha sans bruit et les vit.

Luc remarqua un trou au niveau d'un œil. Il présenta la pierre qui s'y ajusta parfaitement et la luminosité augmenta.

Au même instant, Keireen sauta dans la pièce. Elle fut aveuglée tout comme les jeunes gens par une puissante lueur bleue. Une forme se matérialisa au centre du halo. Une femme en toge blanche, une lance à la main et un casque sur la tête se mit entre les amants et la guerrière.

— Toi ! Tu es revenue !

— Oui Sophia… et cette fois-ci, tu ne me feras pas fuir.

Ils regardèrent alors les deux femmes immobiles qui se faisaient face, n'en croyant ni leurs yeux ni leurs oreilles. Qui pouvaient être ces deux femmes qui semblaient tout droit sorties d'un vieux péplum ?

Elle les regarda quelques instants et leur cria.

— Franchissez ce portail, je vais la retenir ici. N'ayez pas peur, vous serez en sécurité de l'autre côté.

Trop effrayés par la rage qui émanait du visage de la guerrière, ils se jetèrent dans la lumière et disparurent aussitôt.

Hurlant de rage, Keireen se jeta sur sa rivale qui cherchait à l'empêcher de franchir le passage. Aussitôt la blonde parât l'assaut avec sa lance et le duel s'engagea. La brune cherchait à faire reculer son adversaire du halo bleu qui marquait le point d'entrée de ce lieu dans lequel Jane et Luc venaient de se réfugier.

 

Hébétés, ils mirent quelques secondes à se remettre. Ils avaient l'impression que leur estomac s'était retourné dans leur ventre.

— Où sommes-nous ? questionna Jane.

— Je l'ignore… Mais ce que je peux dire, c'est que nous ne sommes plus dans les grottes.

Ils étaient entourés d'une colonnade de marbre blanc dans une sorte de temple rectangulaire.

— Je vous attendais, leur dit une voix provenant du fond de l'immense salle. Approchez !

Lentement ils se dirigèrent en direction de la voix. Une porte majestueuse s'ouvrait devant eux. Ils en franchirent le seuil et découvrirent un ensemble de rayonnage à perte de vue dont les étagères étaient recouvertes de papyrus, parchemins, livres.

— Avancez !

À mesure de leur progression, ils découvraient des documents et des objets que tout le monde croyait disparus. Les écrits étaient classés par auteurs du plus ancien au plus récent.

— Regarde ! Des rouleaux d'Homère, d'Épicure…

— Et là… Saint Paul !

Tout en continuant de s'extasier sur le contenu de ce temple, il avançait. Les papyrus laissaient la place aux parchemins puis aux livres.

— Shakespeare, Cervantes, Goethe, Dante, Dostoïevski… C'est incroyable, ils y sont tous !

— Mais comment se fait-il que je comprenne les étiquettes ?

— C'est une encre psycho-réactive ! répondit la voix en provenance du fond de la salle. Chacun les lit écrit dans sa propre langue. D'ailleurs ! Ne les voyez-vous pas écrits à la fois en français, anglais et afrikaans ?

— Si ! C'est vrai ! remarqua Jane. Je n'avais pas fait attention. Mais comment connaissez-vous mon prénom ?

— Je l'ai su dès que vous avez ouvert ce coffre et touché la pierre. Je vous suis depuis ce moment-là, et j'avais compris que vous arriveriez jusqu'ici. Mais je ne m'attendais pas à ce que vous soyez suivis par cette créature.

— Où sommes-nous et qui êtes-vous ?

— Vous êtes aux sources de la sagesse comme vous l'avez lu sur le texte du parchemin, et moi j'en suis la gardienne ou la déesse si vous préférez…

Ils virent alors apparaître devant eux une grande femme vêtue d'une toge, portant un bouclier avec une chouette, un casque et une lance à la main.

— Athéna ? déclara Luc ébahi. Tout aussi stupéfaite, Jane osa une question.

— Mais la pierre n'est-elle pas la pierre philosophale que recherchent tous les alchimistes ?

— Si bien sûr, mais l'immortalité ne s'acquiert-elle pas par le savoir et la sagesse ? Tous les écrits réunis ici, n'ont-ils pas rendu ces hommes immortels ?

— D'une certaine manière, vous avez raison…

— Ne restons pas là, je ne suis pas sûre que Sophia réussisse à retenir Keireen encore longtemps. Je vais devoir user de ma puissance pour condamner cette entrée. Allez dans la pièce suivante et quoiqu'il se passe où que vous entendiez, surtout n'en sortez pas et attendez mon retour.

— Qui est cette Keireen qui nous a attaqués ?

— Chaque chose en son temps ! Faites ce que je vous dis ! Allez !

Impressionnés par la puissance de la voix de la déesse, ils se dépêchèrent de changer de pièce et une lourde porte métallique se referma derrière eux. Ils étaient seuls dans une autre salle qui semblait tout aussi immense que la première, mais ce n'étaient plus des œuvres littéraires qui les entouraient, mais des objets.

Ils sursautèrent lorsqu'un puissant grondement de tonnerre retentit de l'autre côté de la porte qui se mit à rougir puis à briller. Ils tremblaient sans oser bouger, puis au bout de quelques minutes tout redevint silencieux et la porte reprit sa couleur grise naturelle. Ils étaient de nouveau dans le silence, du plafond émanait une douce lumière qui leur permettait de découvrir les divers artéfacts qui les entouraient. Ici des silex préhistoriques, là un char égyptien, un peu plus loin une yourte mongole des steppes, des objets du monde entier et de toutes les époques les entouraient. Lorsque qu'Athéna les rejoignit, ils étaient en admiration devant le trident de Poséidon qui faisait face au marteau de Thor.

— Eh oui ! Ces objets et ces dieux ont vraiment existé ! leur dit la déesse Athéna. Ils étaient aussi réels que je le suis devant vous.

— Et que sont-ils devenus ?

— C'est une longue histoire, mais ce n'est pas à moi de vous le dire. Je suis la gardienne de la sagesse, c'est à vous d'en trouver la voie comme Bouddha le fit en son temps et d'autres le feront après vous.

Jane regardait autour d'elle et naïvement posa une question.

— Je ne vois ni les tables des dix commandements, ni l'Arche d'Alliance, et encore moins le Graal…

Le rire de la déesse résonna alors dans l'immense salle.

— Ma petite ! Ces artéfacts dont tu parles, ils n'ont jamais existé tels que vous les imaginez… ce dieu fut imaginé par des hommes il y a longtemps, mais il n'a jamais eu d'existence réelle.

Abasourdis Luc et Jane n'en croyait pas leurs oreilles. Les mots qu'ils venaient d'entendre les laissaient muets.

— Comment cela ?

— C'est une longue histoire. Pour le moment, sachez que certaines personnes ont des capacités particulières et sont invitées à prendre des décisions qui influent sur le destin de l'Humanité. Une petite action a parfois de grandes conséquences !

— Le battement d'aile du papillon… dit Jane.

— C'est à peu près cela, oui ! Moïse et Jésus ont réellement existé, ils étaient de ces hommes particuliers. Moïse a pris une décision qui a entraîné tout son peuple derrière lui. Ensuite Jésus a complété ce choix. Cela a eu les conséquences que vous connaissez, mais cela a peut-être empêché un destin plus funeste aux hommes. Ils ont imaginé ce Dieu unique pour être écoutés dans le monde dans lequel ils vivaient, mais l'histoire de l'Exode n'a jamais eu lieu…

— Le jeune couple ne perdait pas une parole de ce que leur racontait cette femme si étrange.

Ensuite, l'histoire a été enjolivée et si les dix commandements ont bien été rédigés, ils le furent dans les rouleaux de la Bible, mais ils n'ont pas été gravés sur des pierres par un dieu.

— Et pour le Graal ?

— Les conteurs médiévaux avaient beaucoup d'imagination ! leur lança-t-elle en partant d'un rire tonitruant. Vous avez toujours aimé les histoires fantastiques. Regardez ! Maintenant vous imaginez des histoires dans l'espace…

— Oui ! C'est vrai !

Alors qu'ils parlaient, elle les avait conduits dans une autre pièce où une table recouverte de divers mets était dressée.

—Restaurez-vous avant que je vous reconduise dans votre monde ! 

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