Jerek2412
vérifiait une nouvelle fois les données que les sondes en orbite autour de la
planète lui envoyaient. Depuis plusieurs millénaires, il surveillait avec
attention un groupe de sauriens qui habitait au pied d'un éperon rocheux
dominant la savane.
Depuis
quelques générations, ce groupe se servait d'outils et ils avaient fabriqué des
armes rudimentaires pour chasser leur proie et affronter les prédateurs géants
qui peuplaient cette planète. Il avait remarqué que certains membres du groupe
n'avaient plus peur du feu et semblaient même avoir une certaine curiosité.
L'évolution suivrait elle chez les dinosaures de cette planète une route
similaire à celle qu'elle avait suivie chez ses ancêtres primates sur la
sienne.
Depuis
son arrivée dans ce système stellaire, Jerek2412 allait de surprise en
surprise. Tout d'abord cette planète avec d'immenses anneaux de glace et ses
innombrables satellites, cette autre géante gazeuse qui du fait de sa gravité
avait fait un grand ménage parmi les comètes et astéroïde de ce système et
enfin cette petite boule rocheuse avec un satellite à faire pâlir de jalousie
une géante gazeuse.
Il
avait satellisé un petit astéroïde sur un point de Lagrange de l'orbite de la
Lune de cette planète, pour y construire ses installations.
Son
cerveau de silicium et son corps métallique n'étaient plus soumis à la
vicissitude du vieillissement organique et à ses contraintes respiratoire et
alimentaire. Avec la lumière d'une étoile, il trouvait toute l'énergie dont il
avait besoin. Entre deux étoiles, il mettait en veille ses systèmes inutilisés.
Ce fut ainsi qu’il put réaliser le long voyage intersidéral depuis son système
d'origine.
Lorsqu'il
avait décidé de partir explorer ce bras galactique, cela faisait plusieurs
milliers d'années que son peuple avait trouvé le moyen de quitter leur
enveloppe de chair et d'os pour transférer leurs consciences dans des puces de
silicium.
Il
avait préparé son départ pendant de longues années. Il lui avait fallu quitter
son corps anthropoïde pour mettre son cerveau électronique dans un corps
susceptible de voyager plus efficacement à travers l'espace.
La
possibilité d'avoir accès à tout le savoir de son espèce en quelques secondes
lui avait permis de construire une fusée pour lancer son nouveau corps motorisé
à travers l'espace. Il avait fait le choix d'un corps capable de produire tous
les éléments essentiels à son projet à partir d'un astéroïde.
Ce
fut sa première étape et son premier défi : vérifier par lui-même que la
pratique collait à la théorie. Il eut des sueurs froides lorsque son moteur de
descente ne répondait pas exactement de la manière dont il l'avait prévu, car
la masse de l'astéroïde ne coïncidait pas exactement aux calculs. Il s'en était
rapproché bien plus vite que ce qu'il avait calculé et il dut en catastrophe
augmenter la puissance de son moteur pour ralentir. Il utilisa bien plus de
carburant que ce qu'il avait escompté et une des jambes articulées avait pris
un angle inattendu.
Après
avoir vérifié que hormis sa position alambiquée et sa jambe tordue toutes ses
autres fonctions étaient opérationnelles, il envoya un message à ses parents et
ses amis.
—
Tout va bien ! Première étape, terminée.
Quelques
heures plus tard, il reçut un message d'encouragement du clone numérique de son
père et un message désespéré de sa mère qui lui demandait de renoncer à cette
folie. Elle ne voulait pas le perdre comme elle avait perdu sa grande sœur qui
s'était aventurée trop près d'une étoile à neutrons et qui avait été cramée
dans un sursaut gamma. On avait retrouvé son corps en orbite autour de cette
étoile complètement inerte, sa mémoire effacée.
Il
analysait maintenant la composition de l'astre sur lequel il se trouvait. Par
chance, il correspondait parfaitement à ce qu'il espérait trouver et il comprit
la raison du différentiel de masse. Cet astéroïde possédait un petit noyau de
fer. Il aurait ainsi plusieurs millions de tonnes de minerais supplémentaires à
sa disposition.
Il
commença par mettre son cerveau à l'abri du rayonnement spatial sous plusieurs
mettre de roche puis il entama le lent processus de production de tous les
systèmes nécessaires à son voyage.
Il
restait attentif à toutes avancées scientifiques et technologiques qui lui
permettaient d'optimiser ses outils qui n'étaient rien de plus que des
extensions de lui-même. Il demandait des conseils aux meilleurs spécialistes
des questions qui l'intéressaient.
Il
comprit très vite que pour le voyage qui l'attendait, il était préférable de
choisir la fiabilité et la robustesse de technologies anciennes plutôt qu'à
l'attrait novateur de système encore incertain.
Avec
ce corps minéral, le temps n'était plus une contrainte.
Au
moment de son départ, il envoya un message d'adieu à travers l'espace avec son
plan de vol. Et, telle une nouvelle étoile, son propulseur illumina le ciel de
sa planète d'origine pendant quelques mois.
Il
mit en veille tous les systèmes qui ne lui seraient pas indispensables à son
voyage et il disparut dans le silence infini de l'espace.
Quelques
milliers d’années plus tard et plusieurs escales dans différents systèmes
planétaires, Jerek2412 franchit le nuage cométaire de ce nuage. Il avait épuisé
la quasi-totalité des ressources de l’astéroïde qui lui avait servi de
vaisseau. Il avait mis à profit son voyage pour construire des sondes et
d'autres appareils de mesures et d'observation.
Il
était certain que ce système allait lui donner satisfaction. Son périple
l'avait conduit à proximité de plusieurs étoiles dont il avait utilisé le puits
gravitationnel pour se propulser encore plus vite. Il était devenu un as à ce
jeu de billard cosmique. À chaque fois, il n'avait découvert que des mondes
déserts et stériles.
Il
se rapprocha d'un objet riche en carbone afin de reconstituer ses réserves,
depuis sa mésaventure initiale, il se faisait toujours précéder sur l'astre par
une sonde afin de mesurer son champ gravitationnel et sa composition
chimique.
En
plus du carbone, cet astéroïde possédait divers éléments lourds ce qui
indiquait que l'étoile centrale du système était une étoile troisième ou
quatrième génération.
Au
cours de son approche, il avait noté la relative stabilité de ce soleil jaune,
un bon signe pour ce qu'il cherchait. La présence de géantes gazeuses sur des
orbites externes et de planètes rocheuses plus proches, dont une avec de l'eau
liquide sur une orbite quasi circulaire, avait accru son excitation.
Il
avait hâte de déployer ses sondes et capteurs sur ce monde prometteur. Sa principale
déception venait de l'absence d'émission radio de la planète.
Il
avait affiné les paramètres orbitaux et il calcula que la dernière étape de son
voyage durerait encore neuf de ses années.
Il
avait dispersé des capteurs partout sur la planète des plus hautes montagnes
jusqu'au plus profond des océans, dans la fournaise des volcans et sur les
étendues glaciales des pôles. Il avait développé un modèle virtuel de cette
planète et il arrivait ainsi à prévoir le lieu où se produisaient les tempêtes,
les séismes ou les éruptions volcaniques. La seule chose qui restait
imprédictible était l'évolution de la vie et le comportement des animaux qui
pullulaient sur ce globe.
Il
avait donc décidé de s'intéresser plus particulièrement à un groupe de sauriens
pour essayer de comprendre le fonctionnement de la vie biologique. Il avait
beau être le lointain descendant d'une espèce qui avait respiré de l'air, mangé
de la nourriture organique, bu de l'eau, avoir eu un cerveau qui fonctionnait
avec un mélange de signaux électrique et chimique, il se nourrissait maintenant
d'énergie électromagnétique ou de réactions chimiques de composés minéraux et
son cerveau fonctionnait avec des impulsions électriques.
Quand
il avait découvert que cette planète abritait une vie évoluée, il avait envoyé
un message sur toutes les longueurs d'onde possibles. Le phénomène était
tellement incroyable qu'il voulait que tous ses congénères fussent informés.
Aussitôt
que son message fut reçu, des centaines de millions de personnes suivirent les
rapports qu'il envoyait régulièrement. Des scientifiques se demandaient si la
vie intelligente y était apparue et s'ils pourraient déterminer le niveau de
connaissance de ses habitants. Les philosophes et théologiens conjecturaient
sur leur croyance.
Quand
il apparut que le plus évolué des animaux de cette planète était un petit
dinosaure, de deux mètres de haut, qui vivait et chassait en meute, l'intérêt
retomba.
Seuls
quelques exobiologistes et exogéologues et de rares curieux s'intéressaient
encore aux émissions de Jerek1242.
Il
n'en avait cure, il avait atteint son but. Voyager à travers les étoiles et
découvrir un monde vierge. Même si la connexion globale de tous les cerveaux
permettait de vivre ce que vivaient les autres, poser ses propres capteurs sur
un Nouveau Monde, découvrir en premier les images, les odeurs, les sons, les
vibrations et tout ce qui se produisait sur une planète grouillante de vie lui
procuraient un plaisir indicible.
Il
était en train de finaliser un paquet de données qu'un spécialiste de la
météorologie lui avait demandé quand il reçut sur son canal personnel une
communication inattendue.
— Bonjour papa ! Je t'annonce que je vais venir te
rejoindre bientôt. Maman m'a enfin donné l'autorisation de voyager seul.
Jerek2412
analysa le message pour en découvrir la source. Il n'y avait pas de doute, ce
Morek0056 était bien son enfant. Un enfant qu'il avait eu un soir de beuverie
électronique, quelques jours avant son départ, avec une jeune étudiante.
Ensemble, ils avaient assemblé des mémoires vierges et y avaient mélangée une
partie des leurs personnalités pour créer ce fils. Même si, à l'ère des corps
électronique, avoir un sexe n'avait plus de sens, il avait décidé de lui donner
une personnalité masculine. Ils l'avaient nommé Morek0056 et l'avaient déclaré
auprès de l'Ordinateur Général qui recensait toute la population cybernienne.
Vorna1075 avait gardé cette nouvelle mémoire et lui avait conçu un corps. Elle
lui avait permis d'accéder progressivement au savoir cybernienne et il venait
d'obtenir son émancipation.
En
fouillant dans ses mémoires Jerek2412 s'aperçut que son amante d'un soir était
l'une des fidèles de ses émissions et qu'elle lui envoya régulièrement de longs
messages auxquels il ne répondait pas.
—
Morek, je serai ravi de te rencontrer et de partager avec toi l'ensemble des
découvertes que j'ai faites sur cette planète… Au cours de ton voyage,
méfie-toi en approchant de l'étoile Y1452X5872Z5698, elle est très instable et
ses sursauts énergétiques violent, utilise l'étoile suivante sur ta trajectoire
pour profiter de son assistance gravitationnelle… indique-moi aussi dans
combien de temps tu arriveras.
Jerek2412
savait que son fils n'aurait ce message que dans plus d'un millier d'années,
mais il serait encore cette étoile ou il avait grillé plusieurs de ses
composants.
Il
n'aurait pas de réponse avant le doublé de ce temps et son fils ne serait pas
auprès de lui avant cinquante mille ans dans le meilleur des cas.
Il
envoya un message à Vorna1075 en s'excusant de ne jamais lui avoir répondu. Il
lui demandait de lui pardonner et il lui proposa de venir le rejoindre. Il dit
s'avouer que même s'il aimait cette solitude, l'absence de contacts proches
afin de pouvoir avoir une discussion soutenue lui manquait. Il décrivit dans sa
longue lettre tous les attraits de ce système stellaire et il finit en
concluant que son âme d'artiste serait comblée.
Il
reçut d'abord la réponse de Morek0054 qui lui indiquait tous les paramètres de
son vol avec les caractéristiques de son corps vaisseau spatial. Son fils
utilisait un énorme astéroïde riche en iridium et avec énormément d'hélium 3 à
sa surface. Il était équipé d’un puissant moteur utilisant la fusion nucléaire
ce qui lui avait permis d’atteindre une vitesse très élevée, il voyageait
presque au quart de la vitesse de la lumière. Cela impressionna Jerek4212 qui
rechercha dans ses bases de données les dernières nouveautés concernant cette
technologie. Quand il avait entamé son voyage, les modes de propulsions les
plus rapides ne dépassaient pas quelques centaines de kilomètres par seconde.
Il découvrit les progrès technologiques accomplis au cours des derniers
millénaires et il put constater que ces congénères pouvaient maintenant voyager
en toute sécurité à des vitesses incroyablement rapides, mais pas autant que
celle à laquelle son fils traversait l’espace.
Il
lui était encore trop tôt pour définir avec exactitude quand Morek0054
arriverait près de lui, mais il put admirer la précision de la trajectoire
après sa dernière assistance gravitationnelle. S’il ne jouait pas avec son
propulseur, il pourrait se satelliser autour du soleil sur la même orbite que
celle de la planète qu’il observait.
La
réponse de Vorna1075 lui parvint bien des siècles plus tard. Elle lui répondit
qu’elle ne l’avait pas oublié et qu’elle conservait avec nostalgie le souvenir
de leur brève étreinte, mais qu’actuellement, elle se trouvait en compagnie
d’un artiste avec lequel, elle pouvait pleinement donner la mesure de son
talent. Elle l’invitait à découvrir ses œuvres qui étaient admirées dans toute
la sphère cybernienne. Elle lui promit que lorsqu’elle aurait fini d’explorer
tout ce que son association avec son partenaire, elle viendrait lui rendre
visite. Il installa une alerte pour être informé de tout ce que ferait
Vorna1075 et il resta de nombreuses années à admirer les chefs-d’œuvre de son
ancienne amante.
Alors
que Morek0054 approchait, les échanges se faisaient de plus en plus rapidement.
Il ne se passait plus que quelques dizaines entre l’envoi du message et la
réception de la réponse. Morek0075 était enthousiasmé par les informations
concernant le groupe de sauriens que son père observait. Depuis quelques
millénaires, les individus qui avaient moins peur du feu avaient donné
naissance à des petits qui réussirent à domestiquer les flammes. Avec de bons
capteurs, les petits feux de camp qui brillaient telles de petites étoiles dans
la savane au milieu de la nuit étaient visibles depuis la station orbitale de
Jerek4212.
Pour
accueillir son fils, il avait décidé de reprendre une forme humanoïde. Les deux
androïdes pourraient ainsi se serrer dans leur bras quand ils se
retrouveraient. Il avait vraiment hâte de l’avoir en face de lui et de pouvoir
communiquer sans aucun délai. Plus leurs échanges s’accéléraient et plus il
découvrait que Morek0054 lui ressemblait quand il était jeune et que sortant de
l’adolescence, il rêvait de changer la société. Son fils lui envoyait
régulièrement des suggestions pour que les sauriens élèvent leur niveau de
développement. Il lui proposait d’intervenir pour leur montrer de nouvelles
techniques.
Jerek4212
avait toujours refusé d’intervenir, il se contentait d’être un observateur.
Plus Morek0054 approchait et plus il insistait pour que son père intervînt.
—
Nous ne pouvons pas ! Il faut laisser les choses suivre leur cours, chaque
espèce doit découvrir et développer par elle-même ses propres technologies.
—
Oui ! Mais regarde le temps que cela prend… Depuis qu’elles ont appris à
maîtriser le feu, il ne s’est rien passé...
—
Ce n’est pas vrai… Ils ont découvert comment durcir la pointe de leurs armes
avec le feu, comme le feu pouvait leur permettre de casser plus facilement la
roche…
—
J’ai bien vu, oui ! Mais ils n’avancent pas… Tu devrais intervenir directement…
Nous serions comme des dieux pour eux…
—
Il est hors de question, et je te rappelle que cette planète, c’est moi qui
l’ai découverte… Je décide donc…
—
Nous en reparlerons face à face, lui répondit Morek0054, et nous verrons alors
qui aura raison…
Jerek4212
fut un peu surpris de la virulence de son fils. Il ne comprenait pas que son
fils ne comprit pas ses motivations. Il espérait que leur rencontre physique
eut un effet bénéfique sur Morek0054, mais il ignorait sous quelle apparence
celui-ci allait se présenter. Il lui envoya tous les paramètres pour qu’il
arrimât son vaisseau au sien. En raison de la très grande vitesse, il savait
que celui ne pourrait se rapprocher de lui qu’après plusieurs orbites autour de
la planète à moins qu’il n’utilisât une grande partie de la puissance de ses
moteurs. Faire ralentir un objet de plusieurs milliards de tonnes lancé à une
telle vitesse demandait un énorme consommation d’énergie.
—
Tu devrais modifier ta trajectoire pour utiliser le soleil comme frein, lui
conseilla Jerek4212.
—
Ne t’inquiète pas, je gère, répondit Morek0054 avec toute la morgue et
l’assurance d’un jeune adulte.
Il
voulait démontrer à son père qu’il était devenu un as de l’astronautique.
En
dépit de l’assurance du jeune homme, Jerek4212 était inquiet, s’il ne
ralentissait pas de manière importante, sa trajectoire le menait directement à
entrer en contact violent avec la planète. Rapidement, Jerek4212 fut stupéfait
de la maîtrise de son fils, il changea légèrement de direction ce qui allait
l’envoyer vers une des géantes gazeuses du système qui le renverrait ensuite
vers l’autre et dans un dernier coup de billard, il finirait par une orbite
autour du soleil qui le reverrait vers son père. Dans un peu plus de deux
jours, le père et le fils seraient enfin réunis.
Ils
semblaient avoir oublié leurs différents et ils se partageaient maintenant sur
un canal privé et sécurisé des confidences sur leurs vies.
Morek0054
décrivait son enfance et son adolescence. Jerek4212 le félicitait ou parfois le
réprimandait gentiment.
—
Je vais passer derrière le soleil… Nos communications vont être coupées pendant
quelques minutes. Attends-moi…
—
Je ne bouge pas à tout de suite…
Jerek4212
observa son fils disparaître derrière l’étoile qui illuminait le ciel. Au bout
de minutes qui lui parurent interminables, il vit le vaisseau de son fils
réapparaître. Il fut surpris de ne pas avoir de contact radio. Il braqua ses
yeux vers lui et il constata avec stupeur que la surface de l’astéroïde avait
complètement fondu. Il ne captait plus aucun signal en provenance de l’objet
dans lequel son fils vivait.
Affolé,
il braqua tous ses capteurs sur l’astéroïde qui fonçait à travers le vide
spatial. Il analysa les paramètres de l’orbite de son fils pendant son approche
du soleil. Il ne comprenait pas, car ceux-ci indiquaient qu’il l’avait survolé
à près d’un million de kilomètres. Il n’avait noté aucune activité particulière
de l’étoile. Celle-ci avait toujours été assez prévisible quant à ses éruptions
qui étaient toujours précédées d’une activité magnétique particulière.
Ce
ne fut que lorsque l’étoile eut tourné qu’il vit la trace d’une éruption
majeure et soudaine. En comparant cette trace avec ses données archivées, il
comprit que l’éruption avait envoyé dans l’espace un plasma de plusieurs
milliers de degrés à plus de cinquante millions de kilomètres de son étoile. Un
peu plus tard, il se réalisa, horrifié
que la nouvelle trajectoire le faisait foncer directement sur la planète,
l’impact aurait lieu dans moins de trois jours.
Aussitôt,
il modifia les programmes de ses unités de production afin de pouvoir
intervenir pour aider Morek0054. Il analysa aussi vite qu’il le pouvait et il
pestait contre cette limite liée à la vitesse de la lumière qui l’empêchait
d’avoir des réponses immédiates de ses correspondants. Pour la première fois de
sa vie, il travaillait seul et dans l’urgence.
Il
se rendit très vite compte qu’il ne pourrait pas faire grand-chose, l’astéroïde
était tellement énorme qu’il n’aurait pas le temps de fabriquer et d’installer
un moteur capable de le dévier. Il tenta de tirer avec des lasers, mais ceux-ci
n’eurent pas plus d’effet que l’impact d’un moustique sur le pare-brise d’une
voiture.
Désespéré,
il ne put que suivre ce qui devenait le tombeau de son enfant entrer à grande
vitesse dans l’atmosphère de la planète et percuter le sol dans une explosion
gigantesque.
En
une fraction de seconde, la presque totalité des espèces vivantes sur ce monde
disparut ou allait disparaître en raison des modifications des conditions de
vie.
Il
poussa un cri de chagrin qui se répandit dans toutes les directions de
l’espace.
Aussitôt
les cyberniens décidèrent que ce système serait à jamais un lieu protégé,
qu’aucun d’eux ne le violerait pour respecter la disparition totale d’un des
leurs. C’était la première fois depuis plusieurs millions d’années qu’un
cybernien mourrait définitivement.
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