Lorsque je me réveillais le lendemain matin, je me suis précipitée sur l'ordinateur pour voir si j'avais reçu une réponse au message envoyé dans la nuit. Je m'y attendais un peu, mais je fus tout de même déçu de ne pas voir de réponse, après trois mois sans nouvelles, il devait penser que sa correspondante avait renoncé.
Claire était
partie dans sa famille pour le week-end. J’étais seule. Je passais la journée à
me reposer et comme je me l'étais dit la veille, j'ai marché le long du canal
en réfléchissant à la situation. Plus le temps passait et mieux je maîtrisais
ce corps, de plus j'avais accès de plus en plus facilement aux souvenirs de
Mireille. L'amitié intime de Claire ne me déplaisait pas et je commençais à
remarquer que les hommes me regardaient. Je n'avais jamais eu ce type de
regards avant. J'ai donc décidé de vérifier cela au cours de ma promenade.
Profitant des
rayons du soleil, je me suis installée sur un banc pour lire tranquillement. Je
restais attentive aux promeneurs, des amoureux en goguette, des familles plus
ou moins unies, de gens seuls à la recherche de l'âme sœur. Je vis des regards
vers moi, des sourires enjôleurs auxquels je répondis. Comme je m'en doutais,
un homme s'approcha de moi et me demanda si j'attendais quelqu'un. Je lui
répondis par la négative et il s'assit à côté de moi.
Un peu plus
tard, nous étions assis à la terrasse d'un restaurant pour profiter d'un début
d'automne radieux. Je réalisais le pouvoir de séduction que j'avais. Je
décidais de ne pas pousser plus loin et je le remerciais pour ce moment passé
ensemble en lui promettant de le revoir un autre jour.
En rentrant,
je jetais de nouveau un coup d'œil sur l'ordinateur, mais ma boîte de messages
restait vide. Je continuais mes recherches sur le net pour essayer de
comprendre ce que je vivais. Je ne trouvais absolument rien de plus que ce que
le site mystérieux en disait et ce que Madame Rose m'en avait dit. D'après ce
que je découvris, nos esprits devaient fusionner plus ou moins rapidement et
logiquement je pourrais réintégrer mon corps à l'issue de ce processus. Cela me
donna un peu d'espoir, mais il n'y avait aucune indication sur le temps que
prendrait cette fusion
Je m'endormis
avec cette interrogation et lorsque je vis un message qui m'attendait, je
l'ouvris avec excitation. Ce n'était que Ludivine qui me demandait si je
n'avais pas oublié son invitation à sa petite fête. Je n'avais pas oublié et je
me préparais tranquillement en choisissant un des ensembles que nous avions
achetés.
Ludivine
m'accueillit avec plaisir.
— Mireille ! Quel
plaisir de te voir. Ludovic est dans le jardin, il prépare le barbecue. Avec le
temps qu'il fait, on va encore profiter du jardin.
— Merci pour
l'invitation ! Ça va me changer les idées.
— Profite du
moment ! Je vais te présenter aux invités.
Elle me
conduisit sur la terrasse où je saluai Ludovic qui avait bien changé depuis sa
mésaventure, il était devenu un homme charmant. Après avoir fait le tour de
leur petite propriété, je proposai mon aide à mon hôtesse.
— Non !
Profite de la journée ! Tiens ! Prends ce plateau et emmène le dehors je te
suis dans quelques minutes.
Je pris le
plateau d'amuse-gueules qu'elle m'avait donné et je retournais avec les autres.
Mon regard croisa alors celui de Laurent, si je me souvenais bien, il
s'agissait d'un cousin de Ludivine.
— Merci ! me
dit-il avec un sourire ravageur.
Mon corps se
mit à réagir comme lorsque Claire m'avait prodigué ces massages dans les
premiers jours de mon aventure. Je réalisai que cela faisait maintenant trois
mois que le corps de Mireille avait été privé de relation avec un homme. Et
devant ces yeux d'un bleu profond, les instincts de Mireille étaient en train
de revenir en force. Je ne pouvais pas la blâmer, j'avais bien cédé aux charmes
de Claire.
— De rien ! Je
posais le plateau sur la desserte et je vins m'asseoir à côté de lui.
— Vous êtes
une collègue de Ludovic ?
— Oui, mais
disons qu'il travaillait surtout avec mon fiancé. Cela me faisait de moins en
moins bizarre de parler de moi de cette manière, j'avais accepté de vivre dans
le corps de Mireille.
— Pourquoi
parlez-vous au passé ?
— On peut se
tutoyer, non ?
— Oui ! Bien
sûr ! me dit-il en riant. Bien sûr !
— Ils ne t'ont
pas raconté ce qui lui est arrivé ?
— Plus ou
moins, mais il va s'en sortir.
— Je l'espère,
mais je n'y crois plus trop.
Et soudain
sans que je comprenne pourquoi, je me suis effondrée en larmes. Était-ce la
sensibilité féminine de Mireille qui reprenait le dessus ?
Laurent me
prit dans ses bras pour me consoler. Je me suis blottie dans ces bras, ce corps
féminin appréciait cette sensation de protection. Je repris contenance et je me
suis reculée en luis souriant.
— Merci,
excuse-moi !
— Je
comprends. Ne t'inquiète pas !
Il me tenait
la main quand Ludivine arriva avec les plats pour que son mari les mette sur le
barbecue. Elle me fit un sourire, mais ne releva pas le fait que je fusse
presque dans les bras de son cousin.
À la fin de la
journée, Laurent me demanda si j'acceptai de le revoir. Nous avions presque
passé toute l'après-midi à parler ensemble, il m'avait raconté son histoire, je
savais ce qu'il aimait et ce qu'il détestait. Je lui avais parlé de moi, de
nous en fait. J'étais troublée, j'étais en train de tomber amoureuse de cet
homme et j'avais bien vu à son regard que je ne le laissais pas indifférent.
Je me rendis à
l'hôpital au chevet de mon corps. Assise là devant lui, je ne pus m'empêcher de
me dire que la situation ne pouvait pas durer, il fallait que je fasse quelque
chose pour arrêter cela.
— Vous allez
bien ?
Je me suis
retournée, Madame Rose se tenait derrière moi. C'était la première fois que
nous nous reparlions depuis son échec.
— Non ! Je ne
sais plus où j'en suis. Je suis en train de devenir Mireille.
— Oui ! Je
m'en rends compte, mais vous ne le serez jamais totalement. Tant que votre
corps sera vivant, vous resterez Clément.
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